Si nous comprenons qu’il fallait programmer un calendrier de mise en œuvre de ce label afin de ne pas laisser s’enliser d’interminables discussions avec les OP, il aurait été plus opportun de définir une date d’entrée en vigueur de l’arrêté plus tardive (donc pas le lendemain de sa publication). Cela aurait permis de débuter les formations des instructeurs en amont et de respecter également le fameux délai de 2 mois imposé aux BER pour répondre aux demandes d’adhésion au label : si de nombreux EECSR déposent des dossiers dans les semaines qui viennent, le délai de 2 mois sera très difficile à respecter par l’Administration (faible nombre d’agents formés à disposition de surcroit, des agents fraichement formés).
Or l’annexe 2 de l’arrêté précise que :
« L’absence de réponse de ce service vaut rejet de la demande de labellisation. L’avis est porté à la connaissance de l’exploitant de l’école de conduite ou de l’association agréée par courrier motivant la décision et faisant également mention des voies de recours. »
L’Administration pourrait donc se retrouver à devoir gérer des recours du fait de son impréparation à assumer cette mission dans les délais impartis.
Deux autres éléments témoignent enfin de la précipitation préjudiciable dans laquelle ce label est déployé :
- L’organisation d'un séminaire pendant les vacances scolaires avec une visio-conférence qui ne fonctionne pas et prive de nombreux DPCSR d’informations sur ce sujet.
- La proposition de formation d'instructeurs dès la mi-mars à Lognes (77) au risque de bousculer l’organisation des services.
Un manque d’effectif prévisible
La gestion de la labellisation des EECSR demande un nombre de missions à mettre en œuvre par les BER ou par d’autres services mais à effectif constant.
1- L’entretien conseil (guider l’exploitant dans la constitution de son dossier en amont de sa demande de labellisation). L’agent qui conseille l’exploitant ne doit pas être le même que celui qui instruit le dossier (il faut donc a minima 2 agents formés à l’instruction par département !) : un casse-tête notamment pour les petits départements.
2- L’instruction des demandes : une vérification qui porte sur de nombreuses pièces administratives. Le BER assure en outre le suivi de ces demandes et leur enregistrement, le cas échéant, dans le registre national de l'enseignement de la conduite des véhicules à moteur et de la sécurité routière (RAFAEL).
3- La mise en œuvre de 2 audits : 2 par EECSR sur une période de 3 ans dans le meilleur des cas (voir ci-dessous). La durée de ces audits sera limitée à une demi-journée : un temps devra être inclus pour les déplacements et les tâches hors-site. En conclusion, sur une période de 3 ans, il faudra prévoir 2 matinées minimum par EECSR volontaires.
4- Le traitement des réclamations provenant des usagers. Ces réclamations remettraient en cause la qualité du service rendu par l’école de conduite labellisée. Il est précisé en annexe 2 qu’un « service de gestion des réclamations » sera « rattaché au service départemental en charge de l’éducation routière ». Pour le SNICA-FO, ce service doit être composé d’IPCSR chapeauté par les (ou les) DPCSR. Enfin, notons que ces réclamations pourront donner lieu au déclenchement d’un audit (ce qui augmentera encore le nombre d’audits à mettre en œuvre).
Le nombre d’IPCSR (voire de DPCSR) dans chaque département doit être adapté à la prise en charge de la labellisation et à toutes les missions qui en découlent, y compris la gestion des relations avec la préfecture. Mener à bien ces missions nécessitera donc un recrutement suffisant d’IPCSR et de DPCSR qu’il conviendra de quantifier rapidement pour les intégrer au PLF 2019.
Gardons également en tête que les DPCSR auront des comptes à rendre en cas de recours des EECSR sur la décision que la préfecture aura prise au vu des éléments fournis par les BER : il convient donc que ces demandes de labellisation ne soient pas instruites à la va-vite.
Des renforts en effectif sont ainsi indispensables pour un traitement serein de ces demandes.
Le SNICA-FO a rappelé cette exigence lors du CSER du 6 mars dernier et continuera à défendre la nécessité de recruter face à l’Administration.
Un label qui n’atteste pas de la qualité de la formation contrairement à ce qui est écrit à l’avant dernière phrase de l’arrêté du 26 février 2018.
En effet, l’instruction du dossier et les audits sont des contrôles purement administratifs : rien sur le contrôle des programmes de formations pourtant rendu obligatoire par la loi (art. L213-4 du code de la route), ni sur l’obligation de contrôler ces programmes (R213-4 du code de la route). Ce sont les suivis d’enseignement dont le SNICA-FO revendique une mise en œuvre actualisée depuis des années. Rien non plus sur la pédagogie déployée par les formateurs, aspect qui semble pourtant incontournable pour qui veut évaluer « la qualité des formations ».
Il est intéressant de noter que l’objectif d’attester «de la qualité des formations » mis en avant dans l’arrêté, n’est d’ailleurs pas repris dans le certificat de conformité en annexe qui se contente d’indiquer que les actions de formation sont « conformes aux critères fixés par le référentiel du label » sans faire allusion à la qualité de la formation.
Par ailleurs, une validation sur dossier (donc a priori) du label peut poser souci : en effet, un avis favorable à la signature du contrat de labellisation sera émis après une simple instruction d’un dossier, composé de documents administratifs et d’engagement sur l’honneur : un audit en présentiel dans l’établissement viendra confirmer cet avis dans les 6 mois qui suivent.
Pour le SNICA-FO, il eût pourtant été plus efficace de conditionner la signature du contrat à l’instruction du dossier administratif et à l’audit sur place afin d’éviter de délivrer un label à un établissement qui finalement ne remplit pas l’ensemble des critères (et donc de devoir lui ôter ce label dans les 6 mois suivants…)
Le référentiel précise par ailleurs que l’auditeur, ne peut assister qu’à des cours théoriques pour vérifier qu’ils correspondent bien aux critères du label (notamment progressivité de la formation). En revanche pour vérifier la progressivité des enseignements ou la variété des parcours pendant la formation, il n’est pas prévu de pouvoir assister aux leçons pratiques…
Les contrôles à effectuer « hors site »
Un certain nombre de contrôles doivent être effectués « hors site », c’est-à-dire en « amont ou en aval du contrôle sur site ».
Il s’agit notamment de :
- Vérifier que les élèves en examen pratique du permis de conduire sont accompagnés par un enseignant de la conduite
- Vérifier, sans que cette vérification se fasse sur site, que l’école de conduite ou l’association dispose d’un site ou d’une page Internet
- Vérifier les taux de réussite communiqués par l’école de conduite
- Vérifier l’existence d’un dispositif de recueil et de traitement des avis des élèves.
Cette modalité pose le problème de la programmation de ces missions. Les prochains échanges avec la DSR devront apporter des solutions pratiques.
Pour le SNICA-FO, il convient bien entendu que ces tâches soient incluses dans la journée de travail, des IPCSR et DPCSR.
Post-permis : le service public écarté !
Le label impose aux EECSR une proposition de formation post-permis pour les jeunes conducteurs.
Le service public n’a donc rien à proposer de ce côté-là ?
Encore un pan de mission qui est confié au privé.
Pour le SNICA-FO, l’intérêt général commande pourtant que le continuum éducatif soit accessible gratuitement à tout un chacun : son efficacité en dépend et seul le service public est en mesure de proposer des formations gratuites.
Le SNICA-FO se félicite cependant d’un certain nombre de garanties
La labellisation est présentée comme un « audit public » et l’attribution du label est qualifiée de gratuite. Par ailleurs, l’article 5 de l’arrêté du 26 février 2018 précise que les audits sont réalisés par des IPCSR ou DPCSR conformément à notre revendication. En ce qui concerne l’instruction des dossiers, rien n’est précisé si ce n’est qu’elle est de la responsabilité des BER.