Pour le moment, Lyon qui en même temps que Toulouse, a créé la première société aéroportuaire en mars 2007, se refuse à tout commentaire. Les lyonnais semblent préférer attendre de voir comment se déroulent les opérations d’ouverture du capital à Toulouse et, en particulier, observer l’attitude des actionnaires locaux que sont les collectivités territoriales (15%) et de la Chambre de commerce (25%). Ce n’est pas le moment d’indisposer quiconque alors que l’objectif est à portée de main. Depuis 2005, date de promulgation du décret sortant les aéroports à vocation nationale ou internationale du processus de décentralisation initié en 2004 avec la loi de décentralisation, le monde aéroportuaire a appris la patience.
A plusieurs reprises, en effet, les gestionnaires des grands aéroports régionaux ont cru que l’heure de la privatisation était arrivée. Notamment en 2011 et puis tout récemment en 2013, la proximité des élections municipales ayant fait peur aux élus locaux qui ont obtenu du gouvernement un report. Pour les collectivités locales, historiquement associées au développement des infrastructures aéroportuaires au travers, en particulier, du financement des travaux, il s’agit de se positionner au moment où entre en scène un actionnaire majoritaire privé. A Toulouse, le gouvernement a promis que les actionnaires locaux seraient pleinement associés à la mise en œuvre de la procédure de privatisation. Ils ont reçu l’assurance que l’Etat exercerait, avec les élus locaux, « sa vigilance sur les aspects industriels et sociaux des offres des candidats ». Reste à voir comment ces déclarations d’intention vont se traduire dans les faits.
- Vue aérienne de l’aéroport de Toulouse-Blagnac. Au premier plan le satellite d’embarquement du Hall D.
- © Philippe Garcia / Aéroport Toulouse-Blagnac
Jusque-là, même si la mise en œuvre de la loi ne s’est pas faite aussi rapidement que l’auraient souhaité certains gestionnaires, les étapes ont été franchies en douceur. Les dossiers sensibles ne manquaient portant pas. Le basculement des salariés des aéroports du statut confortable et sécurisant des chambres de commerce vers celui nouveau et donc incertain des sociétés aéroportuaires s’est fait sans vague. Il a fallu en passer par la création d’une convention collective. L’Etat a du, non seulement rassurer les salariés, mais également faire adhérer les collectivités locales au projet. La DGAC qui était à la manœuvre a donné du temps à la réforme. Elle se félicite aujourd’hui qu’à aucun moment le trafic aérien n’a été gêné.
- Couloir de liaison du Hall D reliant la zone commericale et la salle d’embarquement - Niveau Départs - Zone d’embarquement
- © Philippe Garcia / Aéroport Toulouse-Blagnac
L’inconnue maintenant est la nature des investisseurs privés prêts à prendre le contrôle des aéroports français. Dans le cas du dossier toulousain, l’acquéreur devrait être connu en novembre prochain. Il pourra s’agir de groupes français ou étrangers spécialisés, mais aussi de coalitions. Bien qu’il se désengage du capital des sociétés aéroportuaires, l’Etat conservera son rôle de concédant et de régulateur. Il s’assurera de la résilience économique de l’aéroport et du respect des exigences liées au service public aéroportuaire. Cette loi de décentralisation a été imaginée pour donner une plus grande liberté de mouvement aux aéroports français de plus en plus confrontés à la concurrence étrangère. Les effets de cette réforme pourraient rapidement se faire sentir.
Si Toulouse-Blagnac a initié le mouvement, en revanche, à Nice, le maire, Christian Estrosi, s’est déclaré opposé à la privatisation de "son" aéroport. Il se dit prêt à étudier le rachat des 60% que détient l’Etat dans le capital de la société aéroportuaire pour empêcher que l’« aéroport devienne un hub régional pour compagnies low cost ».
Gil Roy
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