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Retour au moyen-âge

 
Posté le 05/02/2018

Paru en catimini en pleine période de fêtes de fin d’année, le décret n°2017-1845 du 29 décembre 2017 permet désormais à certains Préfets de déroger aux réglementations en vigueur dans de nombreux domaines, sous couvert « d’expérimentation » et « d’allègement des normes ».

Ces dispositions, qui poursuivent et aggravent la démarche initiée sous la présidence Hollande, vont bien évidemment dans le sens d’un affaiblissement des protections réglementaires existantes pour les citoyens.

Des domaines aussi variés que la construction, le logement, l’urbanisme, l’environnement, l’emploi, l’activité économique etc. sont pour le moment concernés.

Annoncée dans la feuille de route du ministre de l’Intérieur, cette « expérimentation »  a débuté le 1er janvier 2018. Elle est finalement prévue pour deux ans et dans plusieurs régions, contrairement à ce qui était envisagé initialement (une région pour un an).

Par ailleurs, le décret précise que deux mois avant la fin de l’expérimentation (soit 2020), les préfets doivent adresser au ministre de l’Intérieur, et au ministre en charge des outre-mer (pour les territoires ultra-marins) un rapport d’évaluation. Ce dernier précisera notamment, « la nature et le nombre des dérogations accordées, les motifs d’intérêt général qui les ont justifiées et [appréciera] les effets de l’expérimentation au regard de ses objectifs ».  Les préfets devront également faire remonter les éventuelles contestations et contentieux dont ont pu faire l’objet les dérogations accordées. Enfin, une synthèse sera transmise par les ministres au Premier ministre.

En clair, les représentants de l’Etat que sont les préfets vont donc être autorisés à ne pas respecter les textes réglementaires qui expriment la loi.

En d’autres temps, ceux qui ne respectaient pas la loi s’appelait des voyous. Quelle époque ! Quelles mœurs !… Par voie de conséquences, ceux qui s’opposeront au fait qu’un préfet ne respecte pas la loi seront déboutés.

Que de chemin parcouru depuis la loi du 28 pluviôse an VIII qui portait création du corps préfectoral !

Alors que le préfet incarnait originellement l’ordre de l’Etat dans cette fraction du territoire que forme le département, il devient celui qui le sabre en sabotant cette émanation de la volonté et de l’intérêt général qu’est la loi !

En ouvrant cette porte, c’est en outre la question de la mise à mal du principe de séparation des pouvoirs qui se pose. Un tel état de fait est grave compte tenu notamment du poids exercé par les lobbies sur les préfets. Certes, de nombreuses dérogations existent déjà dans les textes officiels qui donnent pouvoir aux préfets de déroger, mais elles sont ainsi inscrites dans les textes et ne peuvent être interprétées par l’autorité préfectorale, sauf à en rendre compte devant les tribunaux. Là ce sont les préfets eux-mêmes, qui fixeront les contours réels des textes, regroupant pouvoir exécutif et législatif, ce qui est parfaitement anticonstitutionnel.

Ce décret marque une régression sans précédent et nous transporte au-delà de l’Ancien Régime, car dans ce système, le bailli demeurait le représentant du roi au plan local, chargé de faire appliquer la justice et de contrôler l’administration en son nom. C’est en définitive au Moyen-âge qu’il faut remonter, le préfet tendant à devenir le seigneur tout-puissant sur ses terres ! 

 

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